Book review - février 2017

Tu poursuis inexorablement ta découverte de livres récents (à moindre proportion que d'habitude, les sorties ayant attiré ton attention ont été rares en ce début d'année) comme de livres plus anciens. La preuve étant dans la liste de romans et de recueils de nouvelles ci-dessous...

Le mois dernier, tu parlais des grands auteurs que tu n'as jamais lus, en évoquant Vladimir Nabokov et son Feu pâle. Raymon Carver est un autre exemple. Tu l'as découvert le mois dernier par la lecture de Débutants, dans sa dernière édition, disponible en poche chez Points. Il s'agit de la fameuse version intégrale, et originale, sans les larges coupures réalisées par Gordon Lish, son éditeur. Tu ne peux pas comparer, par ta méconnaissance de l'Œuvre de Carver, les versions longues et courtes des nouvelles de ce recueil, et tu te contenteras donc de donner tes impressions sans juger de la pertinence du travail du célèbre éditeur. Et donc, tu as beaucoup aimé certains textes, moins d'autres, pour un bilan de lecture tout à fait positif. Il faut dire que Carver, représentant de la classe populaire américaine et ancien alcoolique, écrit des textes dans une veine qu'en général, tu aimes bien. Débutants met donc en scène des Américains moyens, plutôt pauvres, souvent alcooliques, aux vies se délitant ou abordant un point de rupture. C'est noir, un peu triste, souvent tragique, mais totalement humain. Seuls certaines nouvelles, par leurs longueurs (Ah !), t'ont semblé inférieures. Les autres recueils de textes de Carver rejoindront prochainement ta bibliothèque.

Il y a un auteur, qui lui, c'est sûr, sait faire court, direct et percutant. Il s'agit de Mark SaFranko, que tu as découvert au travers de Dieu bénisse l'Amérique, paru en français aux malheureuses éditions 13e Note, que tu regrettes profondément. L'auteur américain raconte l'enfance de son personnage fétiche, Max Zajack, à Trenton, dans le New Jersey, dans les années 60. Une enfance inspirée, apparemment, de sa propre expérience et absolument pas enviable, entre violences parentales, humiliations répétées et flirt avec la criminalité. Le texte, composé de courts chapitres, est cru, mais non sans humour. Un livre à ne pas laisser passer si on arrive à mettre la main dessus.

Avec un style tout autre, Thomas Kryzaniac t'avait déjà impressionné précédemment avec son Vivarium. Tu n'as donc pas hésité à te procurer Le Pyromane, paru en 2013 chez L'Âge d'Homme. Tu y as trouvé le même genre d'ambiance, un peu étouffante, les mêmes genres de personnages atypiques et obsédés, paranoïaques, aux comportements qui pourraient paraître incompréhensibles. Mais kryzaniac décortique la folie pour plonger le lecteur, qui s'en délecte, dans un univers un brin malsain, de fascinations pyromane, criminelles et de chats morts.
Jérôme Ferrari est également un auteur de talent que tu connaissais déjà. Lui aussi sait t'impressionner quand il écrit un de ses romans. Balco Atlantico n'échappe pas à la règle. Cette histoire corse est peuplée de personnages qui cherchent, à travers des souvenirs parfois trompeurs, le sens de la vie, de leur vie, ou une direction à lui donner. Le texte, passionnant, brille par la beauté de son écriture et la précision de la narration.
Tu as renoué avec un troisième auteur que tu connaissais déjà. Le Quatrième mur de Sorj Chalandon avait été une de tes meilleures lectures de l'année 2013. Avec Mon traître, écrit 5 ans plus tôt, il revient sur son histoire personnelle, son amitié avec un membre de l'IRA qui trahit l'Armée Républicaine Irlandaise. Tu as d'abord été assez peu emballé par le livre et son personnage principal, ainsi que par un sujet qui te paraissait lointain (en quelque sorte, et à tort, de l'histoire ancienne). Mais petit à petit, transporté par l'écriture sublime de Chalandon et l'émotion qui imprègne le récit, tu t'es laissé convaincre de la justesse et de la beauté de cette histoire d'amitié trahie. Tu liras très certainement, dans quelques temps, Retour à Killybegs, la version du point de vue du traître de la même histoire, écrite en 2011.

Par contre, Jean Hegland, avec son roman de 1996, Dans la forêt, paru en ce tout début d'année 2017 chez Gallmeister, ne t'a pas du tout convaincue. Tu n'as lu que 100 pages de son roman se déroulant dans un futur proche, après une pandémie, et mettant en scène deux sœurs isolées dans les bois. Tu avais été prévenu que le texte n'allait pas être un roman post-apocalyptique comme on en voit parfois, bourrés d'action ou de suspense. Toutefois, tu ne t'attendais pas pour autant à lire, pages après pages, le descriptif d'un ennui mortelle du quotidien et du proche passé de deux gamines passionnées de lecture et de danse classique. Il paraît qu'il se passe quelque chose plus tard dans le roman. Tu ne sauras jamais quoi mais ce n'est pas bien grave.

Débutants (Beginners), Raymond Carver (2009), traduit de l'anglais par Jacqueline Huet et André Carasso, Points, Signatures, février 2013, 384 pages, 9,90€
 
Dieu bénisse l'Amérique (God Bless America), Mark SaFranko (2009), traduit de l'anglais par Karine Lalechère, 13e Note, Pulse, mai 2012, 402 pages, épuisé
 
Le Pyromane, Thomas Kryzaniac (2013), L'Âge d'Homme, Contemporains, septembre 2013, 208 pages, 17€
 
Balco Atlantico, Jérôme Ferrari (2008), Actes Sud, Babel, octobre 2012, 194 pages, 7€
 
Mon traître, Sorj Chalandon (2013), Le Livre de Poche, août 2009, 224 pages, 6,30€
 
Dans la forêt (Into the Forest), Jean Hegland (1996), traduit de l'anglais par Josette Chicheportiche, Gallmeister, Nature Writing, janvier 2017, 304 pages, 23,50€

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