Septembre est le mois de la rentrée littéraire. Livrant ces lignes à la mi-septembre, avant de partir dans le Nord trouver repos, tu n'as pas vraiment encore exploré les parutions récentes. Donc cette revue est pauvre en nouveautés. La seule de 2017 date d'ailleurs de quelques mois, puisqu'il s'agit de Kalpa impérial, sorti en avril. Malgré l'encensement reçu par la critique, ce recueil de nouvelles de fantasy d'Angélica Gorodischer ne t'a pas transcendé plus que cela. Toi aussi, tu pourras saluer une certaine qualité de l'écriture et une capacité admirable de la part de l'auteur à développer avec peu de moyens un univers entier. Toutefois, parmi les textes réunis dans ce volume paraissant aux éditions La Volte, certains sont longs et frôlent l'ennuyeux (tu n'as d'ailleurs pas achevé la lecture de l'un d'entre eux) de par le manque de trame qui les caractérisent. Il manque à l'ensemble un récit, de véritables intrigues pour ne pas passer, par moment pour un catalogage rébarbatif d'empereurs et d'impératrices d'un univers imaginaire. Kalpa impérial s'avère malgré tout une curiosité dont la lecture n'est pas déplaisante en fin de compte.
Tu as à peu près autant de difficultés à apprécier les textes de Fantasy que les vieux récits de science-fiction, ceux de la fin du XIXe ou du début du XXe siècle, qui pourraient être classés, par leurs thématiques et leur souci d'explications techniques, dans la catégorie hard-science. Malheureusement, les aspects scientifiques qu'ils mettent en avant sont bien souvent dépassés, erronés, avec pour résultat une impossibilité, en ce qui te concerne, de suspendre ton incrédulité. Si on ajoute à cela ton manque d'enthousiasme vis-à-vis des histoires de voyages dans le temps, qui résolvent rarement, ou mal, la problématique du paradoxe temporel, Souvenirs du futur, roman de 1929 (publié la première fois en 1989) de Sigismund Krzyzanowski avait peu de chances de faire mouche. Il tombe exactement dans les travers que tu évoquais précédemment, même si l'auteur reste suffisamment vague dans les aspects purement techniques pour ne pas faire sombrer son récit dans l'ineptie. Une simple curiosité littéraire.
Pour compenser ces lectures science-fictives peu enthousiasmantes, tu t'es rabattu sur une valeur sûre, bien qu'anglaise : Christopher Priest. En l'occurrence, son roman Le Prestige, écrit en 1995 et disponible depuis longtemps en français et en poche. Évidemment, le roman, doté d'une bonne réputation, tient toutes ses promesses, Priest distillant avec la maîtrise qu'on lui connaît le suspense et le mystère dans cette histoire de rivalités entre prestidigitateurs de la fin du XIXe siècle. Il faudra que tu te penches sur l'adaptation cinématographique, signée Christopher Nolan (beurk !) et mettant en scène Hugh Jackman et Christian Bale (beurk !)...
Enfin, pour assurer une autre lecture sans surprise (en termes de qualité), tu t'es penché vers Dan Fante, qui n'est jamais aussi bon que quand il raconte son addiction à l'alcool et comment il a essayé d'y échapper. C'est-à-dire les romans et nouvelles où il met en scène son alter-ego (lui-même tout simplement), Bruno Dante. On se rappellera son échec monumental avec Point Dume (Seuil, 2014). La Tête hors de l'eau appartient heureusement à la catégorie des bons romans de Fante, publiés ou republiés chez 13e Note quand cette maison existait encore. Rien de plus à ajouter : il s'agit là d'un bon texte sur l'alcoolisme, doublé d'une diatribe contre l'univers entrepreneurial américain, Bruno étant dans cet épisode employé comme vendeur par téléphone par une société de fournitures de bureau.